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Universal l'a tué...

Je discutais gentiment de l'avenir de la musique avec Michel, disquaire de son état, et un peu déprimé en ce moment.
Nous évoquions nos premiers souvenirs de musique avec émotion ( il y a une génération d'écart entre nous, ce qui fait qu'on écoute pas du tout la même chose) et on se demandait naïvement quels serait dans vingt ans les souvenirs de quelqu'un qui commence à écouter la musique aujourd'hui.
Je vous donnerais pas les résultats de nos analyses (qui de toute façons se sont perdus entre deux bières), je vous laisse faire le constat vous-même.

En revanche, il y a un ceratin nombres de choses qui valent la peine d'être mises au point. Michel subit de plein fouet la crise de la musique actuelle, et supporte en temps que petit disquaire indépendant la concurrence des grandes surfaces, le piratage, le prix des disques trop élevés et toutes ces sortes de choses dont viennent se plaindre sur les plateaux de TV certains éditeurs de musiques larmoyants.

Alors moi je dis bon, on se calme et on reprend :
J'achète des disques depuis que je fais du baby-sitting, donc depuis 1987 environ (Sting, "Nothing Like the Sun", c'est mon premier album à moi, j'avais 12 ans, ah ! Nostalgie...).
Il n'y avait qu'une seule disquaire à Haguenau, au même emplacement que Michel aujourd'hui. C'était un peu plus cher qu'à la Fnac, mais comme il fallait y aller en train, c'était quand même plus rentable d'acheter chez elle. Comme je gagnais entre 40 et 50 frs la soirée de baby-sitting, il fallait travailler 3 soirée pour s'offrir un disque.
Aujourd'hui, j'apprends de la bouche de ma cousine qu'une seule soirée suffit pour s'acheter Kyo ou le dernier Linkin Park... et pas en "prix vert".
Ne me dite pas que les disques sont trop chers, je viens de démontrer le contraire...

En ce qui concerne le piratage, je rigole encore plus jaune. Ca fait pas longtemps qu'on a abandonné les K7, j'en avais une bonne centaine avant d'avoir le moindre disque original... et ça circulait à fond au bahut, tout le monde avait des trucs à se faire écouter. On découvrait les disques des parents des autres, et on passait allègrement des Beatles à Toto, en passant par Mike Oldfield, Joni Mitchell, Bowie ou les Sex Pistols. Aujourd'hui, ma cousine découvre Nirvana parce qu'on en parle à la télé et elle pense avoir fait le tour de la question.

Parce qu'on en parle à la télé !!!
Mais de quelle musique on parle à la télé, vous avez déjà entendu de la musique à la télé, vous ? Avant 23 heures ? De la variété, et encore, n'importe quelle soupe est plus variée...
J'ai cru entendre que les Majors de l'édition musicale arrétaient d'investir dans tout artiste dont l'album ne serait rentable dans les deux mois. Ah, bon ? Alors c'est comme ça, la proximité des poissonneries et des rayons primeurs des grande surfaces en on fait une denrée périssable ?
Moi je propose que les facteurs d'instruments arrètent tout de suite la production et qu'on abandonne aussi les subventions aux écoles de musique alors, l'agonie sera moins longue, pauvre musique, faut pas la faire souffrir plus longtemps...

Quand je pense à des gens comme Michel, qui on vécu pour et par la musique, la vraie, obligés aujourd'hui de se remettre en question à cause de l'inconséquence de quelques vendeurs de serpillères...
Entre la remise en cause du statut des intermittents du spectacle et la marchandisation du travail de l'artiste, on est culturellement mal barrés...

On va finir comme dans "Demolition Man"(imdb) à chantonner des jingles de pubs.

Alors aidez Michel et achetez lui des disques, parce que c'est la musique qui le fait vivre, pas les fruits et légumes ou la vente en ligne.
Demandez-nous sa liste d'occaz' et faites la circuler.

26/04/04 julie